Les humeurs changeantes d'Antigone

    Faut que je parte passer mon bac de français oral. Dans 24 h, et sûrement pas avant, j'en serais revenue. Voilà qui transformerait presque un examen banal en une petite aventure des plus simples, sauf pour moi, qui suis condamnée à voir se transformer en galère la plus petite expédition, le plus petit projet… Je dois me démerder moi-même pour aller passer cette connerie de bac. Normalement, c'était mon père qui devait me conduire, mais il est tombé dans l'escalier samedi soir, et s'est cassé la cheville.

   Maintenant, à la maison, il y a une agréable atmosphère tendue, calme… avant la tempête. J'ai de la chance de pouvoir m'en aller avant que ça éclate ; quand je reviendrais, ils se seront tous entretués, je le sens. Ma mère aura fini par étrangler mon père, tant elle en aura marre de devoir tout faire, et de l'avoir dans les pattes toute la journée, mon père aura fini par se tirer une balle dans le cerveau pour oublier qu'il a été assez bête pour vouloir descendre l'escalier dans le noir, mon frère sera parti vivre ailleurs quand il en aura eu marre de se faire engueuler par ma mère… et ma sœur, elle s'en fout, elle est en Allemagne, et quand elle reviendra, mon père sera guéri. Après tout, cette vie mortelle ne durera que 6 semaines.

   S'il ne faisait pas crevant de chaud, je m'en ficherais d'aller passer ce maudit bac, mais, là, rien que l'idée de devoir me traîner jusqu'à l'arrêt de bus par cette chaleur me rend inerte, après ça faudra que je prenne le train, et après encore le bus. Je suis d'une humeur géniale, je me sens pleine d'énergie et de positivisme… Je me dis, dans moins de 21h, je serais en vacances, et pourtant, cette idée ne me donne envie de rien, et peut-être même qu'elle me déprime davantage. Je n'aime pas les choses qui se terminent, je n'aime pas que le temps passe, je déteste la fin de l'année, et l'achèvement. Pourtant, en général, on est obligé de faire comme si on était heureux d'avoir terminé…

   J'écris pour ne rien dire, j'arrête, je vais faire mon sac, c'est bientôt l'heure. Adieu.