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Les humeurs changeantes d'Antigone


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L'orage / Des souvenirs

   J'aime ça… Cet orage, le son de la pluie, l'odeur d'humidité, le bruit du tonnerre, la lumière des éclairs sur le mur du fond de ma chambre, voir monter la fumée de ma tasse de café, la brûlure de mes mains, de ma langue, de mon palais quand je bois, ce goût amer et douceâtre (3 morceaux de sucre, réservé aux grandes occasions…). J'ai laissé la fenêtre ouverte, le vent me donne froid, mes papiers voltigent partout, les feuilles mortes ne se gênent pas pour entrer.
   Un orage c'est une frontière, comme le moment entre le jour et la nuit, comme l'endroit où mer et terre se rejoignent, l'instant entre la vie et la mort, et la mince rupture entre folie et lucidité, entre le sommeil et la veille… C'est un moment qui tient en équilibre, tout peut arriver, c'est une renaissance… 

   Je me souviens d'orages en mer. L'apercevoir au loin, un rideau d'eau qui s'abat en clignotant… Le traverser… Des instants indescriptibles où je me suis sentie forte… Une envie de faire de cela un ordinaire, une lutte contre les éléments, il faut rester sur le pont, agir… Dans des moments tels, j'ai senti que ma place était sur la mer… Je ne l'ai pas vue depuis un an ; petite pseudo suissesse au milieu de ses montagnes… On n'a parfois pas le choix.  Il faut se trouver un pays, il faut pouvoir se dire ici je suis chez moi, chez moi c'est ici.
   J'étais en Croatie l'été dernier. Un voilier, la famille. Si loin que je puisse me souvenir, c'était comme ça tous les étés. Mon enfance sur l'Atlantique. Un morceau de côte (de l'île de Ré à Belle-Île) que je dois sûrement connaître par cœur. J'aimais l'époque, j'étais heureuse, nous étions heureux, je crois. Mes parents ne s'engueulaient jamais, c'était bien. (Classique, la nostalgie de l'enfance, on se dit que tout était beau et parfait… mais en fait on n'en sait rien.) Je n'avais peur de rien, ma mère n'avait jamais peur, mon père savait ce qu'il faisait, y'avait que ma sœur pour brailler. J'étais petite encore, c'est vrai. C'était avant la naissance du p'tit. Après ma mère a commencé à avoir peur (qu'il soit malade, qu'il se noie…). Il n'y a pas que ça. C'était le voilier de mon grand-père, un bateau qui était génial, pas trop grand, que mes parents connaissaient bien, sur lequel on était bien… Bilbo II, il nous le prêtait tous les étés.  Quand il a pris sa retraite, il a revendu ce voilier pour en acheter un autre. Ça a tout changé ; quand on a des habitudes… Bilbo III était plus long, plus lourd, moins maniable, et ma mère a commencé à avoir peur. Mon grand-père est mort un an après, il s'en est à peine servi de son voilier. Ma grand-mère l'a revendu. C'était la fin de la côte Atlantique, le long de laquelle je n'ai plus jamais mis les pieds. Nous avons continué à faire du bateau, deux semaines par an, sur la Méditerranée. Ce n'était plus pareil. Sur l'Atlantique, le but n'était pas principalement de se baigner, mais plus de naviguer, alors qu'après, c'est l'aspect vacances qui a été privilégié. Et puis, à la proposition de retourner une fois là-bas, ma mère a refusé net : trop de vent, pas de soleil, mer froide…. Je ne comprends pas pourquoi elle acceptait cela il y a 10 ans et plus aujourd'hui.
   L'an dernier en Croatie, nous avons eu ce (petit) orage, on ne risquait rien, j'en reste persuadée (je ne suis pas téméraire, et pourtant je ne sais pas si je me suis jamais plus amusée que ce jour-là) mais ma sœur (19 ans à l'époque des faits) est parvenue à faire paniquer le petit (11 ans), en lui racontant des histoires de tornades…, ma mère a commencé à avoir peur à son tour… Mon frère était véritablement paniqué, je l'avais jamais vu pleurer comme ça… Il a déclaré avoir toujours détesté faire du bateau, et que c'était la dernière fois qu'on l'y prenait. Je ne le comprends pas. Je me souviens du port où nous sommes allés après l'orage. J'ai aimé cet orage pour cela, pour le calme que l'on savoure après, les vêtements trempés qui sèchent sur les filières…
   Cette année on n'est pas partis, et je crains de ne plus jamais naviguer de ma vie. J'ai rarement confié l'importance que cela avait pour moi, sans doute parce que je l'ai découvert à une époque où j'étais incapable de dire le moindre mot à mes parents, et même aujourd'hui, je ne serais pas capable de leur dire. J'ai toujours honte de ce que j'aime, je sais pas pourquoi, j'ai honte de mes rêves. J'aurais voulu apprendre à naviguer vraiment. Actuellement, je ne sais pas si je me débrouillerais. Y'a trop de regrets là dedans, une fragilité à ce sujet qui me ferait pleurer si j'essayais d'en parler à mes parents ; je n'aime pas pleurer devant mes parents.
   Ça m'étonne de n'avoir encore que très peu évoqué ce sujet qui me tient à cœur… 
 

Ecrit par Antigone, à 00:56 dans la rubrique "Du rien sur un tas de vide".

Commentaires :

  Gamin
Gamin
17-08-03
à 04:31

On pourrait presque dire que tu as la mer dans le sang (l'appel de la mer, plutôt), ce qui fait que tu n'as pas peur des orages et que tu apprécies vraiment le calme qui suit la tempête. Mes amis marins à Brest étaient comme toi, et la plupart vivaient les orages sur leur bateau, en rade de Brest, tout comme «l'Amiral» Kersauzon que j'ai eu la chance de rencontrer et d'avoir parlé avec lui. La mer est leur domaine, ils ne pourraient pas vivre sans...

A bien des égards, tu serais un peu comme ça... Il ne tient qu'à toi de réaliser ce rêve que tu gardes en toi : naviguer ! Après tout, les rêves sont faits pour être réalisés (pas tous, mais enfin..)




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