Les humeurs changeantes d'Antigone

tss tss tss... J'suis tombée de haut. Mais je me suis tranquillement ramassée sur mes pattes arrières, comme toujours. Et puis maintenant je me marre. L'imagination humaine n'a pas de bornes, et c'est cela qui est beau. Tant qu'on pourra penser à de telles choses, il reste un espoir, tant qu'il existera des gens comme ça, tout ne peut pas être foutu.
   Si je vous le dis, faut me croire... Vivent les théories à deux balles ! J'ai eu droit à la meilleure jamais entendue. Je l'ai rangée bien précieusement, en espérant pouvoir un jour la sortir à mon tour. Mais bon, ne parlons plus de cette théorie... Vous connaissez celle qui dit que quand on détruit avec véhémence une théorie c'est parce qu'on refuse de l'admettre comme vraie ?
   Non. Non, je ne vis pas aux pays des illusions. Je suis ancrée dans la réalité. Parfois trop. Et dans les moments où elle m'agresse (souvent l'impression qu'elle a les coudes les plus pointus que j'ai jamais vu, et qu'elle ne se gêne pas pour bousculer...) je pars un peu me ressourcer dans le monde des illusions. On y fait des mouchoirs en nuages, des biscuits recouverts de poudre d'étoiles, y'a toujours des marguerites dans les champs et je peux jouer à "il m'aime un peu beaucoup passionnément...".  Mais même voguant au cœur du rêve le plus idyllique, mon ancre repose au fond de l'eau, qu'il s'agisse d'un sol lisse et sablonneux ou du plus accidenté des fonds marins : algues gluantes et rochers aux arrêtes saillantes. Et elle croche bien mon ancre... 
  Finalement, la notion de réalité, c'est tellement abstrait... Y'en a qui s'inventent des rêves meilleurs que leur réalité, et ceux qui se persuadent d'une réalité pire que ce qu'il en est (ils ne tombent jamais ceux-là).
   Je suis perplexe. Je ne sais pas encore quoi penser. Et si j'arrêtais de penser ?
   Je me sens l'âme en paix, débarrassée d'un grand poids, c'est agréable ; je dormirais bien cette nuit.