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Dans le champ, les brins d'herbe dégelaient lentement. Il ne resta bientôt plus de traces de la nuit que les traînées blanchâtres qui demeuraient dans l'ombre des arbres. L'admiration de si simples beautés commençait à la lasser. L'appui de fenêtre où elle s'était recroquevillée, s'abritant du froid autant que possible pour avoir encore la possibilité de profiter de cet air campagnard — tellement vivifiant lorsque dépourvu des habituels effluves fermiers — se faisait déjà glacial.
Elle repoussa les battants de la fenêtre, passa les jambes à l'intérieur, et, d'une manière enfantine (ou même peut-être d'une grâce enfantine), s'amusa de ses jambes qui pendaient dans le vide, et de la chaleur du radiateur qui faisait s'élever dans l'air glacé des volutes fantomatiques qui l'enveloppaient presque.
Le regard dans le vague elle ne le remarquait même pas, mais pourtant, si elle avait su détourner pendant une fraction de seconde son attention de ses rêveries vers ce léger brouillard, elle y aurait vu comme une mince frontière, qui, en cet instant, séparait la réalité de ce paysage et la réminiscence de son rêve de la nuit précédente.
Elle quitta le bord de la fenêtre, la referma et se laissa glisser au sol, adossée au radiateur. Le paysage qu'elle ne voyait plus, magnifique par ailleurs, lui semblait fade comparé aux sentiments ressentis pendant son rêve. Elle s'était encore laissé vivre une vie en une nuit, ce qui devait justifier son épuisement à une heure si matinale, et la peine qu'elle avait eu à se lever.
De Lui, du Lui de son rêve, ne lui restait en mémoire que le regard, qui, se souvenait-elle, l'avait si vite séduite. Elle se rappelait encore la force qui se dégageait de lui, et le courage qui semblait y prendre source. Puis tout s'était déroulé tellement vite… Il y avait eu du bonheur, de ce bonheur aussi léger que le tulle de son voile de mariée, que ses mains dans les premières caresses qu'il lui avait données, qu'une brise méditerranéenne à la tombée de la nuit, en été. Et il y avait eu du malheur, fort, aussi fort que l'amour qu'elle avait senti en lui dans ses bras, la première fois… ça n'allait pas du tout, pour définir la force de ces malheurs, elle ne trouvait de comparaison possible qu'avec celle des moments heureux… parce qu'avec lui même la bise gelée de ce pays semblait agréable.
Cela voulait-il dire que même le malheur avait été heureux ? Encore un rêve qui n'était pas objectif, se désola-t-elle, on ne pouvait pas le prendre en considération ; le prince charmant n'existe pas. Elle s'y serait volontiers résignée s'il n'y avait eu ces rêves qui ne servaient qu'à lui faire miroiter ce qui n'existait pas !
Elle avait encore été prise à ce jeu, un moment encore elle s'y était crue, et maintenant qu'il lui semblait possible de retrouver des bribes de ces sentiments heureux, elle devait quitter ces illusions, revenir à cette petite salle vieillie, à ces trois tables bancales, ces chaises de bois branlantes, ce tableau noir devenu gris et ce sol jonché de bouts de craies, et devrait renoncer à trouver une autre chaleur que celle qu'égoïstement elle volait au radiateur.
On frappa à la porte.
— C'est la récréation !
— Je sors tout de suite M'sieur…
Commentaires :
GiGiDee |
excellent! à la fin, on s'y croirait presque ;-)! tu écris vraiment très très bien... c'est super beau à lire gros bisous |
Antigone 11-12-03
à 23:23 |
Re:Ah... L'inoubliable surveillant du château... Merci (toute rouge...) ! |
snodgass 11-12-03
à 22:04 |
chanceux ce radiateur.
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Antigone 11-12-03
à 22:14 |
Re: C'était pas autobiographique, mais fictif. Sinon c'est vrai qu'en général j'ai des rapports très intimes avec les radiateurs... ;) |
snodgass 11-12-03
à 22:57 |
Re: Re:c'est pas vrai mais c'est pas vrai!!!!!!!!!!!!!!!!!!! tu me fais trop mal
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Antigone 11-12-03
à 23:26 |
Re: Re: Re: Ah bon... Désolée alors... Je voulais pas ! Lol !
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kroline 12-12-03
à 20:57 |
Oo
C'est très agréable de te lire, ça fait rêver... |
Quelqu'un 13-12-03
à 11:48 |
Fictif très proche du réelTon texte est très beau à lire et très bien écrit.
J'ai comme le sentiment que ce n'est pas du fictif mais bien du réel en tout cas pour le contexte du rêve ! Ciao biz |
à 21:02