Les humeurs changeantes d'Antigone

   Ça fait trois jours que je suis de retour… Il m'a fallu un petit moment pour me reconnecter à la réalité d'ici. C'est bizarre, après avoir passé trois semaines à voir plein de gens tous les jours, de n'en voir que 4 : ma mère, mon père, mon frère et moi dans le miroir… Petite vie tranquille, ici… Rien n'a changé en trois semaines ; à croire qu'ils ont besoin de moi pour vivre. Même la boîte de Nesquick n'avait pas bougé de l'endroit où je l'avais rangée. J'en fais une consommation parfaitement excessive, rarement dans du lait, mais plutôt sur les tartines (mon alimentation principale) et à la cuillère… (On s'en fout) Mais vu l'heure à laquelle je me suis levée ce matin, et le temps que j'ai passé à me battre avec cette satanée machine (cet adorable ordinateur), il va falloir me pardonner certaines bêtises.
   Dans mon existence, rien de neuf, je crois. Pourtant une chose qui me rend heureuse, bêtement, puisqu'elle ne me concerne que très peu… Quoique… Après tout, c'est mon amie… Nalia a un copain ! Je lui ai téléphoné cet après-midi, et bien que je ne lui ai pas parlé longtemps, sa bonne humeur était communicative ! Depuis que je la connais, elle se plaint que personne ne l'aime… Comme quoi le bonheur des uns ne fait pas le malheur des autres. Autre nouvelle, mauvaise cette fois, mon Indiscret qui m'avait juré de ne plus le chercher a trouvé ce journal. Le 6 juillet, et au lieu de me le dire directement, il m'a laissé la jolie petite surprise de découvrir ça en revenant. Au moins il l'a dit. C'est déjà ça. Paraît qu'il n'a pas vraiment lu, parce qu'il sait que ça le regarde pas, et qu'en plus ça ne l'intéresse pas. Il a intérêt à faire en sorte que je ne me mette pas à le détester…
   A part ça, je suis chez moi et je ne fais rien… Enfin si, je travaille… Un peu de maths, et j'essaie d'avancer dans la rédaction de mon roman. Je m'amuse à crever, en fait. Quand j'aurais envie je me remettrais au vélo ou à la course… Il va me falloir de l'endurance pour l'an prochain : passer mon bac de gym (torture réservée aux élèves des lycées hors-contrat avec l'Etat français : les notes de l'année ne servent à rien).
   C'est quand même sympa d'être chez soi… En admettant que je puisse me sentir chez moi dans cette piaule dans laquelle je vis depuis 6 mois, qui n'a toujours pas été repeinte, qui sent l'humidité, et dans laquelle je cohabite avec une bonne quinzaine d'araignées toutes plus venimeuses les unes que les autres… J'arrête de me plaindre, elle est bien cette chambre, comme elle est au sous-sol il n'y fait pas trop chaud, j'ai mon ordi et les araignées sont sympas parce qu'elles mangent les moustiques… Et puis, le mieux, c'est que j'y suis seule : pas de charmante jeune fille russe qui téléphone en hurlant à ses parents à 5 heures du matin…
   Peut-être qu'un jour je m'appesantirais plus longtemps sur mes aventures au pays des allemands… Mais en attendant je vais aller me coucher.