Les humeurs changeantes d'Antigone

   Un coup en haut, un coup en bas : mon moral dans l'ascenseur. En ce moment tout me semble affreusement triste et déprimant, mais je sais que ça ne l'est pas. Ce n'est pas de ma faute si c'est comme ça, si ? quand même ? vraiment ? Ok, c'est possible. Bah donc c'est ma faute. Et je sais très bien où est le problème, mais je suis incapable de faire ce qui le résoudrait au moins un peu. Par exemple hier nous (quelques terminales sérieux qui vont à la gym… (3 absences injustifiées -> mention perdue)) étions dans le bus de l'école en direction pour l'institut agricole de ***, là où on va pour apprendre à devenir paysan (ou pour faire les cours de sport), là où ça pue encore plus le purin qu'ailleurs… (digression qui n'apporte rien : j'ai poussé ma déchéance jusqu'à aller m'étaler au sol en sautant du véhicule ; justification : j'avais compté sans le déséquilibre causé par le sac de gym, enfin, toujours est-il que j'étais assise dans la boue, rouge comme une tomate et joliment ridicule…), et une fille regardait mes sms sur mon natel (je tente de me la faire à la française : regardait mes textos sur mon portable) et puis :
Elle : Elle garde que des vieux sms…
Moi : Normal elle en reçoit jamais… (mal aimée, et l'assume !!!) 

Une autre : T'es pas obligée de parler de toi à la troisième personne. (Oups, avais pas remarqué…)
Moi : Normal, je suis limite schizophrène…
Encore une autre : Normal, des sms t'en envoie jamais…

   Conclusion : Il faudrait que je me mette à montrer aux gens que je tiens à eux. Facile à dire. Heu… Comment on fait ? [Bah grosse patate, tu viens de la donner la réponse ! : envoie des sms aux gens, pour leur dire rien du tout…]  

   J'ai épaté le prof de sport : il ne revenait pas de mes dons au badminton ; soudain il a pensé que je pourrais avoir la moyenne au bac de gym (tout son univers en a été chamboulé), j'ai même réussi à éclater miss-nullisime 1 à 12 ! I'm the best ! Mais c'est après que ça s'est corsé : l'épreuve de la douche à poil avec tout le monde… J'ai séché, pas le courage. Et d'ailleurs je ne comprends pas comment elles y arrivent. Je ne crois pas faire de gros complexe sur mon physique. Les rares personnes qui l'ont vu on dit que je n'avais pas à me plaindre, mais même, je peux pas. Qu'on puisse se doucher en public m'a toujours dépassée. Et puis, quand on sait ce qui ressort parfois de ces séances : "Unetelle a les seins qui pendent, mais tu dis pas que je t'ai dit…" D'une fille à un mec, au sujet d'une autre qui lui plaît. Donc pas de douche pour moi après le sport et que celui qui ose dire que je pue vienne me renifler. Bien sûr l'Indiscret comprit bien qu'il y avait là occasion de lorgner mes seins, me saute dessus, me coince contre un mur et flanque son nez dans mon soutif. Disons que c'est un peu une sale brute sur les bords, et qu'il a tendance à penser que c'est parce qu'il a pu toucher une fois à mes seins qu'il pourra le faire toujours. Je sais que c'est de ma faute, j'aurais jamais dû le laisser faire cette fois-là. Mais je lui ai bien fait comprendre qu'il ne devait pas recommencer, avec certains individus y'a que les coups qui marchent.
   Il a compris qu'il avait exagéré, je crois, puisque le soir quand on s'est parlé sur msn il s'est excusé directement. Pour se défendre il dit que cela lui a été utile. En effet, à midi il s'interrogeait sur sa sexualité, et il a dit que cet épisode l'avait assuré qu'il était hétéro. N'importe quoi avec lui, faut toujours s'attendre au pire… Mis à part ça, en ce moment on s'entend très bien. On se parle beaucoup, et hier soir il a vite vu que je n'allais pas très bien. Il a essayé de m'aider. C'était la première fois qu'il ne prend pas la fuite. Lui et moi amis… C'est le truc le plus incongru qu'autrefois j'aurais pu imaginer. Et pourtant… il m'a même passé le carnet sur lequel il se vidait le cœur le mois dernier, quand il était amoureux d'une nouvelle de 1^ère, française… C'est toujours intéressant de découvrir ce qui peut bien se passer dans le cerveau d'un mec amoureux. Curieusement, certaines de ses réactions sont les mêmes que les miennes, alors soit il pense comme une fille, ou moi je pense comme un mec, ou alors il n'y a finalement pas autant de différences dans la manière dont les deux sexes vivent l'amour. Avec cette fille, malgré le mal qu'il s'est donné, y'a jamais rien eu, elle n'a pas voulu de lui, mais je pense qu'il y a eu certaines personnes qui se sont chargées de le dévaloriser devant elle.
   Maintenant, c'est le petit frère de cette fille, qui a 13 ans, qui est amoureux de moi. Manquait plus que ça. J'ai mal pour lui. J'l'aime bien moi ce petit, il me fait marrer. Il se sort bien de son arrivée en Suisse, lui, contrairement à sa sœur qui a plus de mal. Il a une classe d'avance, ce qui fait que la moyenne d'âge dans sa classe est de 15-16 ans, et pourtant il arrive à se faire accepter. La grande sœur par contre n'essaie même pas. Elle passe ses récréations assise sur une fenêtre avec un bouquin. Ce gosse c'est rien de plus qu'un petit frère. Le soir on doit être une dizaine à prendre ce bus pour rentrer en ville, alors bien sûr on fait les cons, le petit y est, sa sœur rarement (bizarre mais les 3^èmes ont plus de cours que les 1^ères). Mais je ne vois pas ce qui a pu faire que le môme se mette à éprouver quelque chose pour moi. Je ne me suis jamais montrée particulièrement intelligente devant lui. Les rares fois où il me voit, à savoir 15 mn par jour, j'ai le nez dans mon bouquin de maths, et je potasse bêtement des formules que je ne retiens pas. Je n'ai rien non plus d'une fille super attirante. Je ne me suis jamais érigée comme un modèle de vertu. Au contraire. Je parle tout le temps de cul et je me montre assez caressante avec n'importe qui [Une vraie salope…]. Faudrait m'expliquer la mentalité des mecs de cet âge là, j'y comprends rien. C'est vrai que par certains côtés que je me suis comportée comme une vraie gosse devant lui, ce qui n'aide pas. Il m'a vue me battre à coup de craies avec l'autre, et d'autres trucs du genre, il sait que je ne tombe amoureuse que de plus jeunes que moi, mais pas au point de détourner des mineurs (1 ou 2 ans de moins que moi, pas plus). Peut-être faudrait-il que je me comporte d'une manière un peu plus adulte, ça éviterait que de pauvres gosses de 13 ans s'amourachent de moi.

Je suis encore malade. Je suis rentrée chez moi à midi, je me voyais mal essuyer deux heures de philo et trois de maths dans cet état-là. Sinon on nous a trouvé un remplaçant pour l'économie grâce au prof de maths, la prof d'éco a accouché d'un petit garçon, ce qui m'a fait perdre de l'argent vu que j'avais parié que ce serait une fille. On va enfin pouvoir arrêter de stresser…