Les humeurs changeantes d'Antigone

Je vais pas trop mal aujourd'hui.

   C'est bizarre, je sais pas trop quoi dire. Comme si finalement j'étais le genre de personne qui n'existe que pour avoir des problèmes, comme si le but de ma vie était de courir toujours après des solutions, après deux petites minutes d'un "bonheur" éphémère... J'en demande sûrement trop à la vie, comme à n'importe qui, comme je le fais toujours. Et puis, c'est quoi le bonheur ? Comment vouloir attraper quelque chose quand on ne sait même pas à quoi cela ressemble ? J'ai l'impression que depuis cette petite déprime à la con ma vision des choses a un peu changé. J'ai eu ces dernières semaines des pensées qui m'ont effleurée pour la première fois, j'ai découvert des facettes que je ne connaissais pas de la personnalité de certaines personnes, et peut-être même de ma propre personnalité, j'ai appris qu'il ne fallait pas se laisser envahir par des pensées sombres quand ça ne va déjà pas... 
   Je vais essayer de me reconstruire, à nouveau, et réussir cette fois à bâtir quelque chose qui puisse durer avant de s'effondrer. Mes mains garderont encore un moment les traces de cette crise, en général elles ne sont pas belles à voir, mais là c'est vraiment moche. Y'a plus de peau sur mes doigts, dès que je prends quelque chose dans l'une ou l'autre de mes mains ça me fait mal. Je ne sais pas pourquoi je fais ça, et j'aurais presque envie de cacher mes mains, j'ai honte de porter d'aussi visibles traces de mon mal-être. Aujourd'hui ma mère a vu toute cette chair à vif et m'a dit que si je me sentais tellement mal dans ma peau je pouvais aller voir un psy. Je ne suis pas sûre d'en avoir ni besoin ni envie, mais je vais quand même y réfléchir. 
   Ce qui m'étonnera toujours avec mes parents, c'est qu'ils remarquent toujours que je ne vais pas bien quand ça va mieux. Hier soir je souriais et tout et tout... et la seule chose qu'ils ont trouvé à me dire c'est d'arrêter de me plaindre, alors que j'avais juste dit que j'avais mal au ventre. Et aujourd'hui, sous prétexte que j'étais habillée toute en noir j'ai encore eu droit à une leçon de morale... D'un côté valait mieux une leçon de morale aujourd'hui que la semaine dernière, je crois que je ne l'aurais pas supportée, et encore moins quand j'étais dans mon trip "j'aimerai être atteinte d'une maladie incurable et en être au stade terminal". Sur le moment, c'était sérieux, mais finalement pas tant puisque je n'y ai plus pensé. Maintenant je ne comprends plus comment j'ai pu vouloir que mon aventure avec la vie se termine là, mal en plus.

   Je pense à plein de choses en même temps, tout se mélange dans ma tête. Je ne suis pas vraiment sûre d'avoir des raisons de me réjouir aujourd'hui, mais pourtant je ne me sens pas mal. C'est cela qui est bizarre, mais j'aimerai bien que ce soit comme ça tous les jours.